08/03/2014

étape finale: le stop libre :)

Pour être honnête, c'est depuis notre belle Crouzette d'Ariègistan que je tape ces nouveaux mots... Quel sentiment étrange! Voilà plus de 2 mois que je suis de retour en terre connue... Si loin de la réalité de la route, si loin de toutes ces rencontres, de tout ces kilomètres, du sac à dos et des pompes usées... Et pourtant si proche de tout ces souvenirs... Mes 2 derniers mois de voyage, en novembre et en décembre 2013 ont été parcourus seul, sans Solenn, rentrée précocement pour sa reprise de taf! Mais ils ont été très riches en rencontres et très fort en émotion...

Le moyen Orient est une terre d'accueil! J'ai vécu cette dernière période du voyage en mode "RETOUR". Quand on me posais la question: "où vas-tu?", depuis le fin fond du kurdistan ou de l'Iran, je répondais, "Je rentre chez moi!"... Alors, c'est le stop qui a été mon moyen de transport pendant cette période d'itinérance libertaire...
J'étais errant, et mon sentiment de liberté était immense, ce qui me paraît aujourd'hui étrange puisque c'était aussi une période de fin de voyage. Mais je traçais la route presque quotidiennement, sans plan, sans savoir où j'allais dormir et manger, sans me préoccuper du lendemain. Je ne pensais qu'à apprécier les instants qui s'enchaînaient, avec en trame de fond le retour vers l'OUEST! Alors, le pouce tendu à l'ouest, j'ai apprécié ma traversée turque en profitant d'abord de l'accueil chaleureux des kurdes, puis en appréciant les derniers rayons de soleil méditerranéens, avec baignade en décembre dans une eau plutôt très bonne...
J'ai eu la chance de passer par Hasankief, un village antique qui rappelle assez les cappadoces, mais qui est amené à disparaître sous les eaux... Projet de barrage hydraulique oblige, le gouvernement Turc met en œuvre les grands moyens pour réaliser ce projet pharaonique (et pourtant pas réellement utile!), avec l'aide de grandes banques internationales. Toute une vallée doit être relogée pour accueillir ce nouveau réservoir d'eau géant et totalement artificiel! Mais en attendant, Hasankief est beau et ses alentours sont encore assez purs, au cœur du kurdistan turc.
Ensuite, j'ai traversé la ville au drôle de nom de Batman, puis Dyiarbakir, Mersin, Gaziantep, Saliurfa, Toutes de belles bourgades ou j'ai été accueilli par d'adorables couchsurfers, qui m'offraient systématiquement le lit et le couvert. Attention! à noter l'énorme clivage homme/femme dans tout ces pays du moyen Orient. C'est un autre monde! Les hommes avec les hommes; les femmes, à la maison, avec les autres femmes et les enfants! Solenn aurait son mot à dire à ce sujet...
J'ai aussi eu l'occasion de participer à des cours d'anglais dans un collège de banlieues de la ville de Batman. Et bien je peux vous dire que c'est plutôt "funky" l'ambiance dans les cours!!! En fin de journée, j'avais des acouphènes dans les oreilles, digne de la sortie d'un concert de ACDC!!!
Entre chaque étape, j'avalais les kilomètres à bord de gros trucks de routiers sympas qui voulaient bien me prendre en stop. Petit à petit, je suis arrivé sur la côte, et j'ai poursuivi le stop avec la mer sous mes yeux, le long d'une petite route plutôt tranquille... J'ai passé de longues heures de liberté à marcher le long de la côte, en attendant le prochain véhicule! J'ai aussi doublé un groupe de 5 jeunes autostoppeurs européens en sac à dos!!! Dur dur le stop à 5! J'étais plutôt heureux d'être seul, parfois, c'est beaucoup plus simple!
Un pêcheur m'a pris en stop et m'a conduit dans sa petite échoppe de bord de mer, son petit magasin de poissons... Avec lui, j'ai écouté de la makina à fond pendant tout le trajet, avec des poches de poissons frais à mes pieds!
Un peu plus loin, un camion de chantier s'arrête: 2 vieux maçons m'amèneront jusqu'au prochain village, sans prêter une grande attention à ma présence! Nikel! la simplicité de l'instant... Les kilomètres s'enchaînent, et c'est tout! Et puis, en bonus, une petite route sinueuse magnifique, le soleil, et la mer! Du bonheur simple!
Je passe une nuit dans un petit motel de côte pour un prix dérisoire (hors saison, les hôtels sont vides). Plus j'approche d'Antalya, plus je vois d'hôtels et moins la côte est sauvage... La route côtière devient moche et ça pue le tourisme de masse à plein nez! Hors saison, c'est juste mort et glauque... La Baule turc quoi! 
Alors il est temps pour moi de remonter vers Istanbul...
Une belle adresse au cœur de la Turquie intérieure, près de Burdur m'a amené à faire une dernière semaine de volontariat, dans le projet de LISINIA: Une ferme WWOOF qui fait un peu de tout et de rien... En bref, le boss est un vétérinaire qui accueille et soigne les animaux sauvages accidentés du coin (cigognes, sangliers, rapaces, chouettes, hiboux, aigles, ...); il y a aussi une activité agricole avec un grand potager et des vergers (grosse culture de coins et de roses notamment...). Début décembre, nous étions quelques 10 volontaires sur le lieu: roumanie, allemagne, australie, USA, slovénie, italie, suède, ... De nombreuses nationalités représentées! L'organisation était... inexistente! Mais après quelques mises au point, nous avons organisé le quotidien et bosser sur le projet (cueillettes des coins, préparation des champs de roses; nourrir les bestioles; préparer à manger pour tous les volontaires avec... RIEN; ..., ...).

Après cette semaine de pose à Lisinia project, je repars vers Istanbul. J'y passerai 2 belles journées, au coeur du quartier de Taksim. Ce quartier dont on a tant entendu parlé par les révolutions récentes. Taksim square contre mister président Abdullah Gül, et sa volonté politique de retour en arrière... Le soit-disant islamiste modéré paraît souhaité un état islamique, sur le modèle de l'Iran... En tout cas, à Taksim, la politique turc pue! Et Taksim, ses bars, ses laconta (cantine populaire), ses galeries d'art, ses salles de concerts et ses caves ne paraissent pas d'accord avec ce nouveau tournant politique! Taksim revendique un islam libre moderne et modéré, avec un système politique laïque et démocratique.
Après 2 jours passés dans l'effervescence de cette ville dynamique, je m’envole vers Paris... Et oui, j'ai pris un petit vol retour, histoire de faire un retour surprise à ma belle :)

Voilà!
Retour
Terminé!
Voyage passé!
FRANCE, mon pays
J'y retourne.
J'ai aimé la route,
Surtout le partage de la route avec Solenn, mon soleil :)
Et je retrouve enfin ma famille et mes amis!

Putain, c'était bon ce voyage!
Et putain, c'est bon de rentrer à la maison!

Depuis le retour, je continue d'apprécier les instants, et je constate qu'ici, les fêtes sont très belles et colorées! Les repas sont succulents, et les ingrédients sains et délicieux; les gens sont motivés pour participer à un monde local meilleur; les maisons sont vivantes; les libertés sont acquises et défendues quotidiennement au moindre écart; les femmes et les hommes vivent ensemble et avancent ensemble au quotidien;

MAIS, J'ai aussi remarqué que la politique française est de moins en moins proche du peuple... En tout cas, bon nombre de citoyens français se dégagent de l'engagement politique, aussi minimes soit-il! Même le vote devient rare... Je suis le premier concerné... Les différents mondes s'éloignent les uns des autres et les ponts entre ces différents milieux se font rares et inaccessibles! On comprend à peu près le monde local dans lequel on évolue, mais on ne perçoit plus le monde politique qui nous gouverne... Voir, nous refusons ce système qui nous régule! Soit! Mais que faire quand il s'agit de voter, d'élire et de choisir des playmobiles que nous ne voulons pas? Je ne souhaite pas parler politique... Je me sens juste totalement largué par toute cette partie de la réalité en 2014! La dette mondiale, les finances qui gouvernent la politique, les chiffres astronomiques et totalement incompréhensibles, le monde de l'industrie qui cherche a produire toujours plus, à créer du besoin dans un monde qui tourne pas totalement rond; les guerres parsemés ci et là sur la planète; les quenelles de querelles politico-médiatiques; les peurs souvent créent par les médias et les politiques, rarement avérées; les tempêtes hivernales sévères; les océans qui se déchaînent; les JO de Sochi et ses milliards; la montée de la haine raciale ou toute autre forme de haine inexpliquée sauf par les peurs; ... Bref! C'est vraiment un putain de merdier sur terre! Ah oui, ça on est bien dans nos petits quotidiens! Mais bon... J'en sais rien! Content d'être rentré mais perplexe quand même!!!
 ...

Je ne sais pas quel vent tourne, mais j'ai vu des révoltés iraniens qui rêvent d'être libre de lire, d'écrire, de chanter, de parler, de s'habiller... Je sais aussi que l'on pend des poètes et des intellectuels... On lapide des femmes infidèles... Solenn aurait aussi beaucoup de choses à dire à propos des femmes, de celles qu'elle a croisées sur les routes de ce monde...

Tout ces constats, tout ces vécus: tout se mélange dans nos têtes, et nous avons parcouru des routes étranges où l'on sent le même vent tourner... Le kurdistan irakien où l'on roule en dodge et chevrolet; l'Iran où l'on célèbre la mort des US et de l'état d'Israël; le Cambodge avec ces ONG souvent louches; le Vietnam, ses champs de café géants pesticidés et ses infrastructures côtières hors normes; la Corée du sud et sa génération 5G où la Wifi est omniprésente et bourdonne dans tous les cerveaux samsungés; le Japon qui paraît désemparé face à la réalité Fukushimesque!; la Russie et sa vieille mafia soviétique qui continue de sévir dans toute l'Asie centrale; L'ouzbékistan et sa mer sèche; Le Tadjikistan et son pamir, perché loin de toute réalité et oublié de son gouvernement; l'Afghanistan dans une réalité pauvre et corrompue; la Turquie avec ses vieilles histoires ethniques et son président barjo; ..., ...


Par dessus toute cette soupe cérébrale, ce que je retiens, ce sont les instants! AKIOUDEBATONS! PROFITONS DE L'INSTANT! Ce qui reste d'un voyage, ce sont des images, des gens rencontrés, des paysages partagés; des discussions ébauchées; des routes parcourues; des sourires; des joies et des rires; Ce qui reste d'un voyage, ce sont des souvenirs... Ce sont des regards...

Ce qui reste d'un voyage, ce n'est rien et tout à la fois!

Ce qui reste d'un voyage, ce sont des souvenirs... des souvenirs.

Ce qui reste d'un voyage, c'est ce qu'on en fait ensuite.

"Pars vite et reviens tard!" Comme me l'a offert Solenn, en livre, avant un précédent long voyage... Je suis maintenant totalement d'accord avec ce titre, après réflexion :)

Souvenirs passés, réalités partagés, Voyage terminé!

Paulin :)